Ca y est, ce 19 novembre, après avoir jonglé une fois de plus avec les kilos, nos bagages sont prêts et le temps est venu d’embarquer pour notre retour sur Manéa. Juste à temps. En Belgique, les arbres sont dépouillés et il commence déjà à geler. Après 23h de voyage (Petit-Dour- Bruxelles National, Bruxelles National-Francfort, Francfort-Recife, Recife-Jacaré ) nous retrouvons avec bonheur notre complice. Tout est y nickel. Pas une trace d’humidité et pourtant nous sommes proches de l’Equateur. Juste besoin de dépoussiérer. La marina y est quasi vide car certains sont déjà partis vers les Antilles ou le sud du pays et les “transatiers” ne sont pas encore arrivés. Une bonne ambiance règne entre les différents équipages cosmopolites et comme d’habitude, les différents tuyaux de voyage s’échangent. Nous avons raté de peu quelques bateaux copains (Bande à part, Iris, Roméo-Charlie ) mais, grâce à la magie d’internet, nous gardons le contact et suivons les trajets de chacun.
C ’est à la poursuite de la découverte du Brésil par les airs et la terre que nous consacrerons nos premières semaines de retour au pays des “slachs”. Tout d’abord un vol de plusieurs milliers de kilomètres vers le sud et les célèbres chutes de Foz do Igaçu et puis un voyage de 24jours vers l’Amazonie. En route donc avec les bourlingueurs!
DU PAYS DE LA SAMBA AU PAYS DU TANGO.
Considération liminaire.
Ce que vous allez lire est un exercice difficile : décrire avec nos pauvres mots ce que nous avons ressenti. Mais il faut que vous soyez prévenus : en aucun cas, la réalité ne se rapproche de cette description, même un peu...
Notre première escapade sera donc pour le sud du pays : les chutes de Foz d’Iguaçu. Trois sites se disputent le titre de champion du monde des chutes d’eau : les Niagara Falls aux USA, les chutes du Zambèze (Victoria) en Tanzanie et celles d’Iguaçu à cheval sur le Brésil et l’Argentine. Etant dans le pays, nous avons donc l’intention d’aller les voir même si elles sont loin. Le Brésil est un pays immense. Elles se situent à 6000kms d’ici ( = distance Belgique-Cap Vert) . Le rio Iguaçu serpente sur 600kms. Il s’élargit et contourne une magnifique forêt avant de se précipiter en formidables cataractes : les 275 chutes s’étalent sur plus de 3kms de large et plongent de plus de 80m de hauteur. Nous y irons en avion. Les vols intérieurs sont très nombreux et peu chers proportionnellement aux kms parcourus car au Brésil il y a très peu de lignes de chemins de fer. Quant au bus, c’est vraiment trop long...
Nous décollons de Joao Pessoa à 2h10 et arrivons à Rio de Janeiro à 6h10 pour une escale technique. Nous ne verrons rien de cette ville où il pleut lors de l’atterrissage. Quatre heures plus tard, nous redécollons et arrivons à Foz vers 12h. C’est une ville sans grand intérêt et nous y logeons à la périphérie, au calme, à l’auberge de jeunesse. Hé oui..
Mais ce n’est pas pour la ville que nous sommes venus ici ; les vedettes de l’endroit, ce sont les “cataratas” c’est-à-dire les chutes.
Les chutes d’Iguaçu marquent une triple frontière entre le sud du Brésil, le nord de l’Argentine et l’est du Paraguay. Ce dernier ne disposant pas sur son territoire d’un point de vue sur les chutes se rattrape en tentant d’attirer les touristes vers une zone franche où les marchandises fabriquées en extrême orient (électronique surtout) sont proposées à des prix sans concurrence...Nous n’y sommes pas allés.
A l’auberge nous prenons le bus “Alimentador” et puis nous empruntons “l’ônibus 120” jusqu’à l’entrée d’un parc immense qui a été crée autour des chutes pour accueillir les visiteurs. Derrière l’importante billetterie et les quelques boutiques de souvenirs le bus du parc dessert un circuit dont chaque arrêt offre un point de vue différent sur les cataratas. Nous-mêmes descendons à la “parada trilha” d’où part un sentier menant, le long du fleuve, vers les chutes. Sur celui-ci des coatis gourmands et opportunistes se promènent eux aussi et un cobra se chauffant au soleil sur la rambarde de la promenade créera beaucoup d’effroi (à juste titre) parmi les touristes.
Les premières que l’on aperçoit sont déjà importantes, mais à un détour du sentier, l’ensemble du site se dévoile d’un coup. C’est très impressionnant...Il y en a plein!!! Hautes, larges, bruyantes. La puissance qui se dégage du spectacle est effarante.
Progressant de points de vue en belvédères, nous atteignons bientôt un kiosque qui donne accès à une passerelle permettant d’aller tutoyer les chutes à mi-hauteur et de très près.
Alors là, c’est le clou du spectacle: au milieu, dessus, dessous...Nous sommes immergés dans un nuage d’embruns. Le bruit est assourdissant....
Abrupte, immense et totalement noyé dans la vapeur d’eau l’endroit s’appelle la “Garganta del Diablo” (gorge du diable) . Comme toujours, les lieux où se produisent des phénomènes naturels impressionnants ou mal expliqués, sont réputés abriter dieux ou diables.
Nous sommes au coeur du spectacle, médusés par le fracas et les embruns et par toute cette puissance qui se déchaîne autour de nous. Quelle splendeur!
L’Argentine entend bien concurrencer son grand voisin sur le plan du spectacle aquatique et dès le lendemain nous quittons donc “Foz do Iguaçu” pour “Puerto de Igazu” réputée plus pittoresque que sa voisine brésilienne.
Nous passerons donc du pays de la samba à celui du tango.
Mêmes principes d’organisation ici que du côté samba : bus, parc à billetterie et magasins de souvenirs. Nous empruntons le “Sendero Verde”, petit sentier qui s’enfonce dans la jungle et où nous aurons la chance d’apercevoir singes, varans, oiseaux, papillons et à nouveau les coatis opportunistes. Nous commencerons ensuite par 2 circuits où sentiers et passerelles à claire-voie tutoyent les chutes. D’abord, le “Circuito Inferior” qui forme une boucle de 3kms et offre une vue des chutes en contre-plongée et nous enchaînerons par le “Circuito Superior” moins spectaculaire mais entretenant le suspense et où les eaux qui se précipitent sont souvent irisées par de magnifiques arcs-en-ciel. Ici les points de vue sont plus nombreux et plus proches de l’eau mais aucun n’offre la vision panoramique d’hier. Nous gardons le meilleur pour la fin et empruntons le Tren Ecologico de la Selva qui nous conduit vers la Garganta del Diablo. Nous continuons cette fois au niveau du fleuve. La passerelle part d’un point tranquille, en amont, elle court à deux ou trois mètres de la surface. Les mouvements de l’eau contre les pilotis témoignent d’un fort courant. Pour preuve, les restes du pont précédent emporté par les crues de 1982. Un peu inquiétant!
Petite prière donc au saint patron des ingénieurs qu’on espère brillants en calculs de résistance des matériaux car au bout de cette longue passerelle sur le fleuve ( 1130m) on surplombe la “Garganta del Diablo” (la même que du côté brésilien mais cette fois vue du dessus) et là le cours tranquille du fleuve change radicalement: 13.000 m3 d’eau par seconde se précipitent d’une hauteur de 90m en 14 chutes dans un canyon en forme de fer à cheval. Cette masse d’eau énorme qui se jette au fond du trou est absolument EPOUSTOUFLANTE de puissance, IMPRESSIONNANTE de bruit et de fureur. Un bruit de 100 locomotives (ou mille?) . Ce gouffre hurlant est presque attirant. L’appel du diable certainement... Durant toute une journée nous avons parcouru plus de 7kms, surpris et à chaque fois émerveillés de la puissance sans limite et la de beauté de la nature...
Chaque côté des “cataratas” a ses avantages : la partie brésilienne offre une vue plus panoramique des chutes tandis que le flanc argentin donne une vision plus rapprochée et plus intimiste. La magie opère dans un pays comme dans l’autre.
Nous visiterons aussi le parc des aves, parc ornithologique en pleine forêt tropicale et peuplé d’oiseaux colorés : toucans, aras de toutes les couleurs, nandous, ibis rouges, colibris, harpies...Nous y verrons aussi des orchidées, de superbes plantes et de magnifiques papillons aux couleurs plus vives les uns que les autres.
Le soir détente dans et auprès de la piscine de l’auberge et échange avec d’autres globe-trotters colombiens, mexicain et même un groupe de tchèques!
C’est donc avec de magnifiques images dans la tête mais surtout du bruit dans les oreilles que nous sommes rentrés à Jacaré avec pour objectif de maintenant préparer nos sacs à dos pour notre prochain périple vers l’Amazonie.
* "Slachs" : version belge de tongues, chaussures très utilisées au Brésil